Parution : Inspecteur Londubec

Le 10 octobre sort ma première bande dessinée en tant que scénariste, Inspecteur Londubec / La cigogne marche sur des œufs. Cet album, dont voici la couverture, je l’ai dédié, outre à mes enfants, à Tchi-tchi et à Stéphane.

Tchi-tchi (Éric Catarina), je l’ai rencontré pendant mes études. Notre amitié s’est nouée autour d’un projet d’exposition de planches originales de BD – qui n’a finalement pas vu le jour – et de retrouvailles régulières, tous les deux ans, à Angoulême… pour le festival. Vingt ans plus tard, après une première vie professionnelle, Éric a réalisé l’un de ses rêves : créer une maison d’édition de bandes dessinées sur sa terre d’adoption, l’Alsace : les Éditions du Long Bec.

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Stéphane Nicolet, c’est en tant qu’éditeur, chez Nathan, que j’ai fait sa connaissance il y a quelques années. Sur chacun des projets que je lui ai confiés, Ton livre à dessiner, inventif « atelier de dessin », Youpi, oups, beurk et Zizi lolos smack, deux albums documentaires ludiques, drôles et sensibles, respectivement sur les émotions et la sexualité, sans parler des trois titres de notre nouvelle collection de culture générale, Les Concentrés, il m’a impressionné par son intelligence, son ouverture d’esprit et sa capacité à se renouveler.

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Quand Éric m’a proposé d’écrire un scénario pour lui et que, ce scénario lui ayant plu, il m’a demandé de lui suggérer un dessinateur, j’ai pensé à Stéphane, même s’il n’avait jamais fait de BD.

Moi-même néophyte en matière de bandes dessinées, j’ai décidé de m’appuyer sur un genre dans lequel je me sentais à l’aise, le polar parodique animalier, pour en avoir écrit plusieurs chez Nathan (deux romans jeunesse, Le Cachalot nage dans le potage et L’Araignée est une fine mouche), mais en visant un public ado / adultes.

Au démarrage du projet, la diffusion était censée être limitée à l’Alsace*. C’est pourquoi le héros de mon histoire est une cigogne : l’inspecteur Londubec, un clin d’œil à la maison d’édition. Une idée m’est venue rapidement : faire enquêter sur un trafic de bébés. Je savais déjà qu’à la fin de l’histoire, la cigogne ramènerait à ses parents, soulagés, le dernier bébé enlevé par les malfrats, emballé dans un baluchon, comme dans l’imagerie populaire !

* La diffusion est finalement nationale, l’éditeur ayant changé son fusil d’épaule.

corbeau-14486Cela dit, dans cet album, l’inspecteur est surtout confronté à une sombre histoire de lettres anonymes,comme dans l’affaire de Tulle, dans les années 1920, qui a marqué les esprits. C’est ce fait divers qu’a repris Cocteau dans sa Machine infernale en 1932, puis Clouzot dans son Corbeau en 1943. Cette bande dessinée en est également une adaptation lointaine.

canardo-12560En me lançant dans cette BD policière avec des animaux anthropomorphes, je ne pouvais pas ne pas penser aux deux références du genre que sont, pour les amateurs de BD, Inspecteur Canardo, de Sokal, et Blacksad, de Canales et Guardino. Curieusement, je n’ai lu qu’un ou deux albums de Canardo et de Blacksad et, je l’avoue, je n’ai pas particulièrement accroché : dans les deux cas, je n’ai pas été captivé pblacksad-6690bar le scénario. Question de goût ou de circonstances… En revanche, je paierais cher pour une planche originale de l’une ou l’autre série. Avec un petit faible pour Blacksad !
Mais revenons à notre cigogne… Tandis que ces maîtres de la BD se sont attachés àrestituer l’atmosphère sombre, voire glauque des films noirs américains des années 1950, j’ai plus fait le choix de l’humour que du polar.

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Ma marque de fabrique, si j’ose dire, ce sont les jeux de mots. Une fois encore, je m’en suis donné à cœur joie, allergiques aux calembours, s’abstenir ! Et cela, dès le casting des personnages : du journaliste Lafouine au banquier, un écureuil, en passant par le facteur Cheval, les rôles ne sont pas distribués au hasard. Ci-dessous, le père Castor, perché sur sa chaire, et au premier plan, une de ses paroissiennes, une grenouille de bénitier…

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Quant à l’inspecteur Londubec, malgré le climat délétère qui règne à Trifouilly, il a toujours le mot pour rire et un alexandrin pour chaque circonstance. Comme celui-ci alors qu’il se trouve en fâcheuse posture :

Souffrez qu’un Alsacien près de perdre la vie 
déguste sa dernière choucroute garnie !

Si l’histoire se passe à une époque indéterminée, je fais quelques allusions à l’actualité de ces dernières années, comme les scandales de la viande avariée reconditionnée ou des prothèses mammaires défectueuses.

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Je glisse également de nombreuses références à des personnages, des films ou des livres qui ont marqué ma jeunesse : Popeye, Hulk, Cyrano de Bergerac, les Fables de La Fontaine, Tintin et le secret de la Licorne.

Voici, sur une planche assez représentative de l’album, la façon dont nous avons travaillé, Stéphane et moi.

Sur la base d’un séquencier, validé par l’éditeur, j’ai écrit le scénario. Le scénario, ce n’est pas seulement l’histoire, c’est un document qui donne le découpage planche par planche, et pour chaque planche, case par case, de la future bande dessinée. Le dessinateur y trouve tout ce qu’il faut pour attaquer les dessins : pour chaque case, le plan préconisé (gros plan, plan moyen…), la description de la case (les personnages que l’on voit, si besoin la façon dont ils sont habillés, ce qu’ils font, le décor…), le récitatif éventuel (ce petit texte qui précise par exemple l’heure et le lieu), enfin les dialogues.

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À partir de ces indications, Stéphane propose une esquisse de la planche (des crayonnés rapides). Parfois, il suggère d’ajouter ou de supprimer une case, de cadrer telle case autrement, de couper du texte dans telle autre. À ce stade, nous sommes aussi très attentifs au sens de lecture des phylactères (les bulles). Pas toujours facile de les positionner dans la case !

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Une fois que nous nous sommes mis d’accord sur les corrections de texte et de dessin, Stéphane passe à l’encrage et à l’ombrage (le fait de poser les ombres sur les personnages et les décors). Au début du projet, il avait suggéré des phylactères sans cerné et des lettres minuscules pour les textes. Pour se rapprocher de la BD classique, l’éditeur lui demandera de revenir aux phylactères avec cerné et aux capitales.

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Enfin, c’est la mise en couleurs. Stéphane se fera un peu aider pour « livrer » ses planches dans les temps.

 

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