La loi des séries

Depuis quelques années, la plupart des éditeurs grand public se tournent massivement vers les séries, qu’il s’agisse des poches ou des grands formats. Certains ne publient plus du tout de titres isolés – je parle des premières lectures et des romans, pas des albums.

Les investissements marketing (pub, PLV…) et commerciaux consentis pour le lancement d’une série peuvent être amortis sur plusieurs titres, et une fois la série bien installée, les nouveautés se vendent (presque) toutes seules. Bien sûr, les choses ne sont pas aussi simples, et la concurrence frontale entre séries – cheval contre cheval, vampire contre vampire, est sans merci ! Les « one shot », comme disent les Anglo-Saxons, ont bien trop de mal à exister à côté des séries : ils font moins parler d’eux, et ils sont souvent perdus dans les rayons.

Je n’ai rien contre les séries. Il y en a de bonnes et de moins bonnes, comme tous les livres… Ce qui est positif, c’est qu’elles offrent à l’enfant un contrat de lecture sur la durée. Et tout le monde y gagne : l’enfant lit avec plaisir, les parents sont rassurés, l’éditeur gagne de l’argent, et même l’auteur, une fois n’est pas coutume, s’en sort… Tout le monde y gagne… sauf les auteurs qui ne publient pas de séries à succès, puisqu’il n’y en a désormais que pour elles. C’est bien connu, on n’achète que ce qui se vend bien. Et les séries à succès, aussi médiocres soient-elles, éclipsent des livres pourtant meilleurs !

Comme auteur, mais aussi comme lecteur et comme parent, je ne vois pas d’un bon œil cet ostracisme vis-à-vis des titres isolés. Combien de séries longues – c’est particulièrement vrai pour la bande dessinée – deviennent répétitives et ennuyeuses au bout de quelques tomes ? Un « one shot », au contraire, permet de traiter une idée forte mais qui ne tiendrait pas la longueur.

Et si les poules avaient des dents ? est la victime d’un serial Publisher ; Nathan, en l’occurrence.

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Ce titre qui, pendant des années, a bien marché (commercialement) et suscite toujours autant d’intérêt dans les classes – je m’en étonne à chacune de mes interventions –, n’a pas été repris dans Nathanpoche lorsque Première Lune a disparu.

Certes, je pourrais proposer ce titre cher un autre éditeur, mais pourquoi reprendrait-il un titre déjà paru ailleurs quand il peut offrir de l’inédit ? À moins d’un gros coup de cœur, bien sûr…

     

En contrepartie, Nathan m’a donné l’occasion de publier une série sur le foot, En avant foot !, dont vont sortir en mai prochain les troisième et quatrième tomes, toujours illustrés par Clément Devaux.

L’éditrice s’est adressée à moi parce que je connais bien et apprécie le foot – j’ai déjà fait une petite place au ballon rond dans certains de mes livres comme Fatou Diallo Détective – et qu’un registre humoristique lui paraissait bien convenir à cette série qui s’adresse aux 6-8 ans.

D’un commun accord, nous avons décidé de placer l’action dans le futur pour y introduire, entre autres, des extraterrestres qui pourraient apporter un peu de fantaisie et d’humour dans les matchs. Pour le reste, j’ai eu carte blanche.

Hatier a expérimenté pour moi une formule qui me convient parfaitement en me confiant une série d’humour dans Hatier poche – nous l’avons appelée Grain de rire. Il s’agit en quelque sorte d’une « série de titres isolés » : chaque titre se suffit à lui-même, il n’y a pas d’univers ou de personnage récurrent.

     

Ce qui lie l’ensemble des titres, c’est l’humour, plus particulièrement les jeux de langue, et les illustrations. Pascal Carbon illustre les textes pour les 6-7 ans, et Laurent Audouin les textes pour les 7-9 ans. En librairie, cette série sans personnages récurrents semble s’être bien plutôt bien comportée. À suivre…